Avec Icíar Bollaín, venue plusieurs fois au Cinemed, Fernando León de Aranoa est l’autre grand cinéaste social espagnol. Deux figures du cinéma hispanique qui montrent que critique sociale et succès cinématographique peuvent se conjuguer. Pour sa première venue à Montpellier, Cinemed consacre toute une rétrospective au cinéaste espagnol le plus primé, couvert de Goyas, en projetant 10 films dont 3 en sa présence, jeudi et vendredi : Les Lundis au soleil, El buen patrón, A Perfect Day, un jour comme un autre. Une rencontre avec le public est prévue ce vendredi à 17h au Corum.
Voir Ne dis-rien de Icíar Bollaín (2003) est indispensable quand on s’intéresse à la question des violences conjugales. Un film qui a déclenché une prise de conscience en Espagne et fait évoluer l’arsenal juridique espagnol devenu très avant-gardiste.
Les Lundis au soleil
Au même moment, en 2002, Fernando León de Aranoa commence sa carrière de cinéaste avec Les Lundis au soleil : chronique sombre sur le déclin de Vigo en Galice, une ville industrielle du nord de l’Espagne après la fermeture d’un chantier naval, et rappelle également le drame des chantiers navals de Gijón. Le tournage a d’ailleurs eu lieu dans ces deux ports du nord-ouest de l’Espagne, Vigo en Galice et Gijón en Asturies. Un drame social qui « n’est pas basé sur une histoire vraie… mais sur mille » selon la formule de Fernando León de Aranoa qui s’est inspiré de syndicalistes. Ce film lui vaut une reconnaissance internationale. Il reste un des grands films de référence des années 2000 en Espagne. Projection le jeudi 23 octobre à 18h15, centre Rabelais, en présence du réalisateur.

El buen patrón
Près de 20 ans après Les lundis au soleil, Fernando León de Aranoa retourne dans le monde du travail, cette fois-ci pour raconter une petite entreprise qui fabrique des balances, dont le propriétaire et directeur agit comme un maître et seigneur. Mais contrairement au film Les lundis au soleil, dont l’âpreté et le réalisme sont assez radicaux, El buen patrón (2021) est une comédie sociale à la veine satirique affirmée, virant presque au vaudeville. Tourné dans une ancienne usine, située dans la banlieue madrilène, le filme pointe le grotesque du pouvoir du chef d’entreprise trônant dans un bureau dont le vitrage à 360 degrés lui permet de voir tout ce qui se passe dans l’entreprise. Patriarche sirupeux, exerçant son droit de cuissage, jetant au rebut les salariés sans se départir d’un étrange sourire paternaliste : le public espagnol a plébiscité ce film qui a reçu 3 Goyas, les Oscars espagnols, en 2022. Projection le vendredi 24 à 19h, Opéra Berlioz, en présence du réalisateur.

A Perfect Day, un jour comme un autre
Cette écriture satirique était déjà à l’oeuvre dans A Perfect Day, un jour comme un autre (2015) au casting impressionnant : Benicio Del Toro, Tim Robbins, Mélanie Thierry, Sergi López, Olga Kurylenko. Dans ce portrait de groupe grinçant et désabusé sur l’engagement humanitaire, l’Espagnol, qui a couvert la guerre en Bosnie mais aussi filmé des membres de Médecins sans frontières en Ouganda, avait affirmé un style, dans une comédie absurde, rappellant le cinéma des frères Coen ou le Mash de Robert Altman. Projection le vendredi 24 à 14h, Opéra Berlioz, en présence du réalisateur.

Trois films avec Javier Bardem
On ne peut pas parler de Fernando León de Aranoa sans évoquer Javier Bardem. Le personnage principal des Lundis au soleil, le rugueux Santa, et le patron pervers de El buen patrón : c’est lui. Regardez ces films juste pour cet immense acteur, qui est aussi à l’affiche d’un autre film du cinéaste espagnol, Escobar (2017), qui raconte l’histoire d’amour entre l’empereur de la cocaïne, chef du cartel de Medellin et une journaliste américaine (Penélope Cruz). Où le cinéaste des laissés-pour-compte livre un biopic efficace mais qui ne rivalise pas avec la série Narcos et minimise le personnage féminin (tout comme les femmes sont dominées dans A Perfect Day, un jour comme un autre) au point qu’on a parlé de la misogynie du fameux cinéaste espagnol…
Photos : Aux Goyas @DR, Les Lundis au soleil @ José Angel Egido, El buen patrón ©Paname Distribution, A Perfect Day, un jour comme un autre @ Fernando Marrero.
Le Cinemed se poursuit jusqu’à samedi, 25 octobre.