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Quinqua : fini les “Sois vieille et tais-toi”, mais faut-il s’en réjouir ?

La quinqua est devenue presque “bankable”. Pour preuve, tous ces gros titres et autres pubs qui vantent la beauté de ces femmes qu’il y a peu, on disait “ne plus être baisables”. Réelle évolution sociétale ou nouvelle injonction faite aux femmes ?

Quinqua et toujours pas morte : la femme mûre

C’est plus qu’une simple impression : depuis quelques mois, la quinquagénaire et ses bouffées de chaleur ont pris une nouvelle dimension dans les médias. Pour s’en convaincre, une rapide revue de presse féminine suffit. Les exemples sont aussi nombreux que récents : en novembre 2021, le magazine “Marie-Claire” offrait à ses lectrices des portraits de femmes quinquas et plus qui assumaient leurs cheveux gris. Quelques mois plus tard, le même magazine titrait “Faire de son âge une force”, avec la sexygénaire Andie MacDowell en couverture (avril 2022) qui a fait sensation au dernier festival de Cannes avec ses cheveux blancs fièrement assumés. Un autre grand titre de la presse féminine, “ELLE”, consacrait quant à lui tout un article intitulé “50 ans, la belle vie” (janvier 2022) à cette tranche d’âge qui désormais se revendique gourmande. Et même si les filles qui continuent de faire les Unes semblent avoir tout juste atteint leur majorité, force est de constater que depuis quelques mois, on voit apparaître de nombreux articles sur l’élégance de ces femmes mûres, la beauté de leurs rides…

Si la presse féminine s’est approprié le sujet de la quinqua contemporaine, c’est à Agnès Jaoui que l’on doit d’avoir braqué sur la “femme mûre” le tout premier projecteur tendre et drôle. L’actrice et réalisatrice, née en 64, ouvrait le bal des invisibles dès 2017 avec “Aurore” (photo à la UNE), l’histoire d’une quinquagénaire qui doit se réinventer entre deux bouffées de chaleur, pour ne pas sombrer dans cette dépression à laquelle nos bouleversements hormonaux semblent nous condamner. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si c’est une comédienne qui a été la première à thématiser les 50 ans des femmes. Elles sont encore souvent les premières victimes d’un phénomène qui consiste à refuser à toute femme de plus de 45 ans le droit de toujours se considérer comme étant désirable.

Les comédiennes quinquas sont encore souvent les premières victimes d'un phénomène qui consiste à refuser à toute femme de plus de 45 ans le droit de toujours se considérer comme étant désirable.

Invisibles et indésirables ? Les belles se rebellent

Car, oui, aujourd’hui encore, passer le cap des 45 ans revient à acquérir un super-pouvoir, selon un bon mot qui ne fait pas rire (toutes) les quinquas : on devient invisible. Phénomène bien connu qu’une autre célèbre actrice, Juliette Binoche, évoquait à la sortie du film “Celle que vous croyez” (photo) : “ il est vrai que les femmes plus mûres ne sont plus vues, plus regardées. C’est très ancré dans notre inconscient collectif.”

Résultat : pendant longtemps, quand la presse parlait quinqua femme, c’était toujours un peu tristounet à lire. En gros, les femmes de plus de 50 ans étaient aussi montrées, sur les écrans et dans la presse, que toutes ces “minorités invisibles” pourtant bien présentes dans notre société. Et jusqu’il y a peu, le triste constat était que, de nos jours, être désirable implique encore d’être jeune, en tout cas pour les femmes. Les hommes, eux, pouvant se contenter d’être riches.

Pourquoi cette injustice ? Visiblement, la réponse se cache dans une répartition des rôles quelque peu archaïque, qui voudrait que l’attractivité des femmes soit intimement liée à leur faculté à procréer. Parce que s’il y a bien UN sujet relié à la femme de 50 ans, c’est : la ménopause. Pourtant, c’est pas parce qu’une femme ne saigne plus qu’elle est morte.

Joyeuse ménopause !

Il est donc logique que ce soit l’autre grand sujet dont s’est emparé la presse ces derniers mois : l’assèchement de nos utérus ! Citons rapidement : “Version Femina”, l’hebdo féminin distribué avec plusieurs titres nationaux, qui avait plus ou moins entamé la réflexion sur ces ovaires qui se flétrissent dès septembre 2021, avec un hors-série sur “La Ménopause & moi”. L’hebdomadaire féminin “ELLE” promettait de dire “Tout ce qu’il faut savoir sur la ménopause” en janvier 2022, et même Bien-être & Santé, organe des pharmacies de France, s’est fendu d’un dossier spécial ménopause, c’est vous dire (octobre 2021). Depuis deux ans, la ménopause est pour ainsi dire entre toutes les lèvres, même celle de Michelle Obama, ex-Première dame des États-Unis, qui n’a pas hésité à partager ses expériences. Sur amenovia.com, on trouve plusieurs exemples de sites, articles, podcasts et autres qui ont pour sujet la fin des règles.

Faut-il s’en réjouir ? Quelque part : oui. Quand on lit le billet de Dr Aga, plume bien connue des lectrices de “ELLE”, on est en effet affligées du silence autour de nos stocks d’ovocytes qui s’épuisent. Dans son billet du 19 juin 2022, citant une étude britannique sur le sujet, la journaliste expliquait ainsi qu’“une femme sur deux ne dirait pas à son conjoint que sa ménopause a commencé. Un cinquième d’entre elles n’en ont parlé à personne lorsque les premiers symptômes sont arrivés, et une majorité n’a pas abordé le sujet avec leurs amis.”

Un nouveau podcast pour la quinqua, brossé par J'ai piscine avec Simone.

Il est donc en effet temps d’en parler, des quinquas. Mais en même temps, méfiance, préviennent certaines. En fait, ça ressemble quand même à une nouvelle injonction faite aux femmes, celle de bien vivre une période de leur vie qui est pourtant tout sauf simple, tempère Maryse Thiebaud, nutritionniste-diététicienne. Elle accueille et accompagne chaque jour des femmes qui doivent faire face à des événements extérieurs bouleversants, tels que le fameux “nid vide”, et qu’on le veuille ou non, les changements hormonaux qui sont, pour certaines, très difficiles à vivre, et ne doivent pas être sous-estimés.

Un avis que partage Marie-Pierre Genecand. Si son article date d’avant la plupart des publications pro-quinqua, les témoignages qu’elle a recueillis confirme ce qui se murmure beaucoup entre copines : c’est pas toujours si évident que ça d’être une femme et d’avoir 50 ans. “Derrière la couche de vernis, surgit un récit étonnamment homogène qui parle d’épuisement, de situations absurdes et de sensation de gâchis. Oui, entre 50 et 55 ans, beaucoup de femmes se sentent obligées de lutter contre le poids, les rides, la fatigue due à sommeil perturbé, la fragilité émotionnelle, les sautes d’humeur, etc, pour garder l’allure et l’élan d’une quadra. Elles y laissent, disent-elles, beaucoup de plumes, sans pour autant gagner la partie”, peut-on ainsi lire dans son article intitulé “Femme 50 ans ? Le nouvel âge ingrat”.

La lucidité reste donc de mise, même quand celles représentent les quinquas d’aujourd’hui s’appellent Monica Belluci, Vanessa Paradis ou Emmanuelle Devos, et revendiquent, souvent joyeusement, leur cinq et quelques décennies de vie. Parce que, oui ; le cap des 50 ans reste délicat à franchir. Mais s’informer, en parler, écouter des podcasts sur le sujet (photo ci-dessus), permet indéniablement de dédramatiser, et de se sentir moins seule(s). Et en mettant ainsi en lumière toute une génération de femmes qui s’assument, et assument leur âge, on permet aux hommes d’évoluer eux aussi.

Ce qui, même pour eux quinquas qui sont tout autant confrontés au temps qui passe et à la peur de vieillir, est plutôt une bonne nouvelle.

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Dom
Dom
1 année il y a

Et si les hommes n’attendaient que de partager ça avec les femmes ?
Soulever le couvercle ne peut que les y aider.

Marie Urdiales
1 année il y a

Cher Dom, tout d’abord merci pour votre commentaire. Optimiste, certes, et le jour où je ne verrai plus de vieux croulants enlaçant de jeunes créatures qui ne sont PAS leurs filles, j’y croirais! Plus sérieusement, il est vrai que des amis hommes de mon entourage se confient eux aussi (bien que plus rarement que les femmes) sur leur crainte devant ce troisième âge qui les grignote. En attendant, notre société reste encore très focalisée sur l’apparence, surtout féminine, et c’est bien dommage. Il appartient donc aussi à vous, messieurs, de nous aider à nous sentir “baisables” même après 45 ans 😉

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