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Un squat éphémère à Juvignac avec KompleX KapharnaüM

Accueillie par L’Atelline, “lieu d’activation art et espace public”, la représentation de “Continent” par KompleX KapharnaüM a fait doublement surgir le réel : l’organisation d’un squat à Lyon, trame du spectacle, et celui né du public de Juvignac, ce samedi 22 octobre, occupant la scène par effraction.

“Un grand type à cheveux frisés est arrivé.” C’est Stéphane Bonnard, l’interprète et l’auteur de “Continent”, qui raconte comment il s’est laissé dépasser par les mots du réel. Il était parti sur “une histoire de concessionnaire auto et de ses clients”. Il avait déjà en tête tous ses personnages, ceux qui viennent se consoler avec une jolie voiture rassurante, les maniaques de 4L en quête du dernier modèle vivant ; des petits moments qui dévoileraient notre société à travers son rapport avec la voiture. Et puis ce grand type, donc, est apparu “depuis le bas de la page” pour lui annoncer : “cette histoire, poète, elle ne tient pas le coup”. C’est du vécu qu’il faut parler, réinventer.

“Continent” est issu de l’expérience qu’a partagé, pendant 18 mois, Bonnard avec 350 personnes qui ont fondé un squat à Lyon. Exit les voitures ! Kass, Mohamed, Iris, Nour et tous les autres occupants du lieu s’invitent dans le texte en train de s’écrire, leur façon d’en prendre possession insuffle du réel, matière première de la Cie KompleX KapharnaüM.

Depuis 20 ans, ces artistes brouillent les frontières de la ville, inventent des espaces scéniques dans les territoires urbains, donnent la parole aux habitants, offrent aux spectateurs une vision décloisonnée de notre quotidien. À Juvignac, ils ont investi le parking de la salle polyvalente avec un merveilleux dispositif : léger et percutant. Une atmosphère à la Mad Max. La musique inspirée électro de Mathieu Monnot, puissante et juste, est tout simplement très belle, et la grue lumineuse actionnée par Pierre Duforeau rend vivant le bitume, qui devient un espace de tous les possibles. Les chaises sont disposées en demi-cercle face à l’espace réservé aux artistes.

Depuis 20 ans, donc, KXKM – dont le “camp de base” est à Vaulx-en-Velin – détourne l’espace public, ouvre des portes imaginaires vers le réel. Et voilà qu’ici, le squat se fait squatter. Il est question d’un Mohamed, et c’est Ibrahim, échappé du public, qui passe derrière le comédien en dansant. Le texte évoque des grappes de “gosses” partout : ils sont là, encourageant l’effronté dans ses transgressions. “Vas-y Ibrahim !” Le récit continue. Le déblaiement des bâtiments à occuper, l’organisation du groupe. La langue est riche, sensible. Une communauté prend son destin en mains dans les mots du comédien. Mais celle des spectateurs est ce soir décidemment surprenante. Le petit groupe d’enfants interfère et pénètre sur scène. Le récit continue, imperturbable, face aux effractions. C’est une sorte de joute. Le texte : “Nous sommes des mutants”. “Non, on est des bandits !” lance un gamin. Ça alors. Prise en otage de la représentation ? Non, on assiste plutôt à une étrange et totale réussite du projet de KXKM, inventeur de spectacles appropriables, de ceux qui vivent au présent, pour de bon.

Dans le cadre de la série de conférences “Demain l’espace public”, organisées par la Maison de l’architecture Occitanie Méditerranée, la ZAT (Zone artistique temporaire) et TRANS/ZAT, programme d’urbanisme culturel, Marie Antunes, la directrice de l’Atelline, évoquera plusieurs projets menés dans les communes de la métropole de Montpellier. Le 8 novembre à 19h à la Maison Voltaire à Frontignan.

Crédits photos : KompleX KapharnaüM/L’Atelline.

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