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Ashley Taieb : « L’addiction, il ne faut pas la juger mais l’accueillir »

Son histoire est impressionnante. Ancienne toxicomane et SDF, la montpelliéraine Ashley Taieb est la fondatrice de My Addie, « la première solution digitale française pour gérer ses pulsions addictives ». Sa success story a démarré après son passage dans l’émission « Qui veut être mon associé ? » sur M6 où elle a séduit le jury où figurait le fondateur de Meetic. A suivi une présentation de son projet à L’Élysée et à la Maison Blanche. Elle sort un livre « Ma liberté si je veux » aux éditions Buchet Chastel. LOKKO vous propose de la rencontrer le 21 mars au Social Bar (*).

 

« Montpellier a été la ville de ma renaissance »

 LOKKO : Ashley Taieb vous publiez un récit autobiographique « Ma liberté si je veux ». Vous avez grandi entre Ibiza, Tel Aviv et Istanbul, voyagé comme en fuite en Thaïlande, en Australie, au Brésil. Vous avez vécu des années de dépendance à la drogue. Dans ce livre vous écrivez : « J’ai malmené mon corps. Je l’ai privé et saturé de nourriture. Je suis tombée dans le crack. J’ai survécu 4 ans dans les zones les plus dangereuses de Paris. Je m’en suis sortie ou peut-être que tout simplement je suis redevenue libre ». Vous vivez aujourd’hui à Montpellier, vous écrivez que c’est la ville de votre renaissance.

ASHLEY TAIEB : Montpellier a été la ville de ma renaissance parce qu’elle a été très douce pour moi qui ai toujours aimé les grandes villes avec beaucoup de bruit, beaucoup d’activité… Après cette période à Paris qui a été un peu fatigante, on va dire…, qui a touché mon estime de moi, mon appétence à m’ouvrir au monde, Montpellier a été comme un petit cocon. J’ai pu doucement y reprendre mes marques, recommencer à me balader dans la rue pour d’autres raisons, recommencer à rencontrer des gens… J’ai vraiment eu un lien très fort avec cette ville parce qu’elle m’a littéralement ramenée à la vie en fait !

 

« Dès qu’on dit addiction, la conversation est terminée »

Dans ce livre, vous vous livrez sans tabou. Qu’est-ce qui vous a décidée à écrire ce récit autobiographique ?

Il y a une multitude de choses. Je pense que, tout d’abord, une histoire personnelle, quelle qu’elle soit, gagne à être partagée. J’estime avoir eu beaucoup de chance et je me suis sentie en devoir de partager cette libération de la parole, cette envie de lever les voiles, et de parler aussi d’un tabou. A partir du moment où on prononce le mot « addiction », la conversation est terminée et ça c’est une chose qui m’hérisse le poil, en fait. Il y a l’addiction certes, mais avant ça, il y a ce qu’on appelle la pulsion, qui nous emmène vers un comportement addictif. C’est un phénomène qui est présent chez tout un chacun aujourd’hui, que ce soit dans la nourriture, les achats compulsifs, le travail… à une échelle plus ou moins grande. Et je pense que c’est une vraie responsabilité de porter ce message et je suis fière et honorée d’avoir eu la chance par mon parcours de pouvoir le faire, de porter ce message d’amour en fait, d’acceptation et d’espoir.

 

 

« Le maître mot, c’est le stress »

L’addiction est souvent liée à un mal-être, pour vous c’était la peur de grossir. À Paris, quand vous viviez dans la rue, vous constatiez que fumer du crack coupe la faim et à partir de là vous maigrissez à vue d’œil, tombant dans un piège infernal…

Je pense qu’on peut passer beaucoup de temps à chercher les causes. C’est un travail intéressant, qui prend du temps. Mais que ce soit pour l’alimentaire, la drogue et le reste, pour les personnes que j’ai pu rencontrer, ce qui compte c’est « aujourd’hui maintenant qu’est-ce qu’on fait ? ». Il y a certaines personnes pour qui la peur de grossir va être une excuse, un symptôme. La question est plutôt : « comment est-ce que je m’appartiens dans le monde dans lequel j’évolue, avec une pression grandissante sur la perfection, une pression grandissante sur la performance, qui je suis en tant que personne, si je ne suis pas dans la norme… » Vous voyez : il y a vraiment une profondeur. Je pense que le maître mot, c’est le stress. Le stress de la performance, le stress de l’appartenance, de notre mode de vie. La gestion quotidienne de ce stress est une des clés pour réussir à vivre au quotidien avec ses pulsions addictives, sans avoir nécessairement trouvé leur cause. Cela prend du temps mais ce qui compte c’est ce que je fais avec ça et c’est ce qu’on a voulu créer avec My Addie.

 

 

Vous avez essayé un peu toutes les méthodes, médicamenteuses, des psys, des médecines parallèles, et rien n’a vraiment fonctionné. Vous avez créé votre propre méthode My Addie. Pour la décrire, vous utilisez trois mots clés : accueillir, accepter, agir. Est-ce que vous pouvez nous expliquer ça ?

Alors, on ne peut pas dire que tout ce que j’ai essayé n’a pas marché parce que ce serait injuste. Il y a énormément de choses qui existent et qui sont excellentes. Ce qu’on vient proposer vient en complément des solutions existantes. En revanche, c’est vrai, il y avait certains endroits, dans les solutions que j’ai pu tester, où j’ai ressenti qu’il manquait une voie du milieu, en fait. Au niveau de la discrétion, au niveau de la disponibilité, pour ne pas attendre trop de temps avant d’avoir un rendez-vous avec un professionnel, de pouvoir aussi, financièrement, assumer de suivre plusieurs thérapies en même temps – c’est assez coûteux, tout le monde ne peut pas le faire. Vous voyez, l’idée était vraiment de démocratiser l’accès à toutes ces choses, à tous ces apprentissages dans une solution unique, disponible et discrète. Et ensuite, nous avons réfléchi à une méthode universelle qui est le fondement de ce programme, basée sur cette dynamique d’acceptation. Comment est-ce que je peux mieux accueillir mon addiction ? Mieux la comprendre ? Mieux l’expérimenter ? Voilà les fondements de cette méthode iconoclaste. À aucun moment, on ne vient porter de jugement sur les comportements addictifs, qu’est-ce qui les entraîne… On pose un constat très simple. Aujourd’hui, le stress dans la société, l’environnement dans lequel on vit, génère des pulsions qui emmènent vers des comportements addictifs. Comment bien s’occuper de nous dans ce contexte ? Ce qu’on a voulu créer, c’est un peu une salle de sport de la gestion de soi. C’est un vrai entraînement au quotidien sur notre mental, notre corps, notre âme. Une solution de fond, une solution de soutien.

 

« Une méthode validée par la neuroscience »

Cette méthode thérapeutique personnalisée, vous l’avez développée avec des professionnels de l’addiction. Comment vous les avez choisis ?

Évidemment, c’est une méthode créée par une addict pour des addicts, et ça le sera toujours. Le point initial a vraiment été mon expérience personnelle sur la nourriture, les drogues, ainsi que toutes les rencontres que j’ai pu faire, mais il était évident qu’on ne pouvait pas se limiter à mon expérience personnelle. On a fait intervenir tout d’abord une psychologue clinicienne, qui est aussi psychologue en thérapie cognitive et comportementale. Elle a supervisé tout le processus thérapeutique de nos divers programmes. Et ensuite, on a voulu enrichir ce processus thérapeutique par plusieurs disciplines : l’hypnothérapie, la naturopathie, la sophrologie, l’art thérapie… On a vraiment voulu ouvrir le prisme. Ensuite, nous avons fait valider notre méthode par la neuroscience, par les courants de la neuroscience les plus contemporains. Le programme a été enfin soumis au prisme de la pédagogie afin qu’il soit vraiment simple et évident d’utilisation.

Ce qui est très novateur aussi, c’est qu’on peut se mettre sur My Addie 24h sur 24h et faire son choix, construire son propre programme.

Tout à fait. Écoutez, c’est un des points qui a été très important pour moi et pour mon équipe par la suite, c’est de garder cette disponibilité, cette autonomie. Vous voyez, tout le monde a son moment différent de disponibilité dans une journée. Nous, on a voulu redonner cette liberté à la personne et lui redonner confiance, car elle seule peut savoir ce qui est bien pour elle.

 

 

Je voudrais revenir sur votre passage, l’an dernier dans l’émission de M6 : « Qui veut être mon associé ? ». Vous avez séduit le jury qui a financé votre projet. Est-ce que vous pouvez revenir sur cette expérience incroyable ?

 « Qui veut être mon associé » a été un sacré tremplin, le début d’une grande aventure. À l’époque, My Addie était au stade embryonnaire. J’ai obtenu le soutien des cinq investisseurs présents sur le plateau donc Marc Simoncini, le fondateur de Meetic, qui ont investi à hauteur de 20 000 € chacun, donc 100 000 € en tout. Le véritable envol de My Addie a été, peu de temps après le tournage de l’émission, la rencontre de mon associée Emilie Villaret, qui accompagne des boîtes en croissance. My Addie est la synergie de nos deux expertises, de son expérience du monde du business, et de mon expérience personnelle.

 

« My Addie, c’est bien plus grand que moi »

Vous avez aussi arrêté la drogue parce que vous êtes tombée enceinte. Vous le racontez dans ce livre qui est aussi un peu une thérapie pour vous ?

Ce livre et cette plateforme, vous savez, me dépassent totalement. On a complètement dépassé le cadre de l’auto-thérapie, là. Moi, je suis vraiment sur une mission de vie et une croisade qui me dépasse, vous voyez ce que je veux dire. Ce livre est fait aussi de témoignages et de personnes qui m’ont fait confiance. Accueillir et agir en solitaire sur les phénomènes qui prenaient place en moi a été un début, mais aujourd’hui My Addie, c’est bien plus grand que moi.

 

Rencontrez Ashley Taieb le mardi 21 mars à partir de 19h au Social Bar de Montpellier. Un événement LOKKO. En savoir +, ici

« Ma liberté si je veux », Ashley Taieb (Buchet Chastel), 224p, 19€.

Le site de My Addie, ici

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