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Rétro 2023 : les coups de cœur LOKKO

Ovidie, Oppenheimer, Miyazaki, De Keersmaeker, Nina Faure, Lana del Rey, Triste tigre, Chien de la casse (photo), la Flûte enchantée, Pēteris Vasks. Livres, séries, théâtre, danse, ciné, jeu vidéo : les coups de coeur LOKKO pour 2023 !

Par Lionel Navarro

“Au NON des femmes-Libérer nos classiques du regard masculin” de Jennifer Tamas

Paru aux éditions du Seuil, l’essai est agréable à lire, sans esbroufe ni défilé de grands mots universitaires. Il permet à son lectorat de sortir des interprétations entendues, dès les classes du collège, au sujet des femmes et des héroïnes du XVIIe siècle, ce fameux Grand Siècle qui a pu faire bâiller ou s’inquiéter tant d’élèves dans les classes de français. Des personnages connus : Bérénice, Andromaque, la Belle au bois dormant, La Princesse de Clèves…, des écrivaines : Madame de Sévigné, Madame de La Fayette, Mademoiselle de Scudéry…, des écrivains : Racine, Perrault…, un imaginaire collectif dans lequel le refus et le consentement féminins, à l’époque du Roi-Soleil, sont à redécouvrir.

“A Greater Beauty : The Drawings of Kahlil Gibran”, The Drawing Center, New York

Kahlil Gibran n’est certainement pas que l’homme du livre mondialement connu « Le Prophète ». Depuis son adolescence, l’auteur libanais dessinait et peignait. Les œuvres picturales exposées à NYC ont la majesté sereine de la sagesse et du mysticisme syncrétiques qui refusent la violence. Trouvant son inspiration auprès de William Blake jusqu’à Puvis de Chavanne, Gibran offre à voir une merveille singulière des couleurs et des formes que, parfois, certains rêveurs fréquentent dans leurs rêves. Ici

“Le compositeur et son ciel : Pēteris Vasks” sur Arte

Ce documentaire capte, sans impudeur, les émotions du compositeur letton de 77 ans au travail. Au travail : quand il marche seul le long du littoral baltique, quand il nage dans un lac, quand il s’adresse à la caméra, quand il est à son piano, quand il chantonne, quand il met en notes sur une partition qui se remplit ce qu’il entend en lui, quand il écoute les oiseaux, la mer, le vent, quand il parle de la nature, du dérèglement climatique, des guerres. Au travail : pendant des répétitions avec un orchestre, un pianiste soliste, un trio à cordes ; pendant qu’il raconte l’histoire tragique mais espérante de son pays confronté au nazisme, au communisme, libéré avec la fin de l’empire soviétique… Un compositeur engagé, jovial, soucieux, rayonnant. Sa musique, contemplative, immédiatement accessible, belle, belle, belle jusqu’à l’envol, veut répondre à la guerre hégémonique menée aujourd’hui par la Russie en Ukraine. Ici. 

Par Eve Tsirigotaki

“Did You Know That There’s a Tunnel Under Ocean Blvd” de Lana Del Rey

Lana Del Rey est une artiste remarquablement prolifique dont le neuvième album studio est sans doute son meilleur. Diversifiée, nuancée et interrogative Lana Del Rey elle nous rappelle que la pop ne doit pas nécessairement être apathique et facile à digérer. Elle peut aussi être conceptuelle et exploratoire.

“Oppenheimer” de Christopher Nolan

Oppenheimer est le film le plus politique de Christopher Nolan. Intensément humaniste, intelligent et perspicace et son meilleur film.

Par Gérard Mayen 

“Chien de la casse” de Jean-Baptiste Durand 

Au printemps 2023 sur les écrans, Chien de la casse cumule succès public et succès critique. Il s’agit du premier long-métrage du jeune réalisateur montpelliérain Jean-Baptiste Durand. Il filme à hauteur d’être une jeunesse méconnue, bien à part, un rien gilet-jaunesque : celle des villages, qui n’ignore rien de la vie urbaine, mais ne se confond pas avec la jeunesse des cités. Un formidable trio d’acteurs -Raphaël Quenard, Galatea Bellugi, Anthony Bajon- incarne trois jeunes gens dans l’étourdissement des cruautés relationnelles et du désir d’exister. Le film est nominé aux Césars dans plusiers catégories.

“Mysteris sonatas” de Anne Teresa De Keersmaeker

A l’automne 2023, le public de la saison Montpellier Danse découvre la toute dernière pièce d’Anne Teresa De Keersmaeker. Génie absolu de l’analyse des structures musicales, la célèbre chorégraphe flamande en tire des pièces dansées étincelantes. Cette fois, Mysteris sonatas égrène sur plus de deux heures l’enchaînement répétitif de sonates d’époque baroque, qui jamais ne s’épuisent dans une résolution. Enigmatique, la pièce est exigeante, austère, voire rébarbative pour une partie du public, mais follement porteuse d’élévation méditative à travers le geste, pour la plupart.

Par Hélène Bertrand-Féline

“La Flûte enchantée” 

L’OOMLR en association avec l’opéra de Lorraine débute 2023 avec une Flûte enchantée  visuelle et colorée. Un pari réussi qui fait salle comble pour une mise en scène ludique et enfantine qui ne dessert pas le mythique opéra Mozartien. Un univers visuel proche de Disney dont les personnages oniriques sont musicalement à la hauteur. Une tendance qui se confirme avec le succès de La Vie Parisienne  mise en scène par Christian Lacroix qui clôture l’année.

“Triste tigre” de Neige Sinno

Conseil de lecture LOKKO dès septembre 2023, Triste Tigre de Neige Sinno est LE succès de cette année. Succès confirmé par le prix littéraire du Monde, le Fémina et le Goncourt des lycéens. Au terme d’un récit glaçant et personnel, l’auteur accomplit l’exploit d’une œuvre littéraire universelle et salutaire. Une lecture nécessaire qui emporte tout sur son passage et demeure hors de portée des réactionnaires de tout poil.

Par Valérie Hernandez

“Après la répétition” et “Persona” de Ivo van Hove

Une des premières de prestige comme on voit de plus en plus au Printemps des Comédiens qui est devenu producteur de quelques pièces-phare qu’il programme. En attendant, en février 2024, “Bérénice” de Racine par Roméo Castellucci avec Isabelle Huppert, un souvenir fort parmi tant d’autres : deux pièces issues de la filmographie du suédois Ingmar Bergman qu’Ivo Van Hove a adapté pour le théâtre avec une puissante scénographie. Deux acteurs stars au casting, Charles Berling et Emmanuelle Bercot. Le duo infernal entre metteur en scène et actrice, entre démiurge et muse, densifié par les jeux de rôle d’un couple. Qui soumet ? Qui aliène ? gagne ? Un moment d’exception dans l’amphi d’O.

“We are coming” de Nina Faure

La montée en puissance du féminisme français racontée de l’intérieur. Un documentaire rare, à la croisée de l’intime et du social, qui se veut témoin d’une époque où les questions de corps, de sexualité et de genre sont devenues primordiales. LOKKO avait rencontré la montpelliéraine Nina Faure, documentariste et co-autrice du manuel féministe “Notre corps, Nous-mêmes” à l’occasion de l’avant-première de son documentaire au Diagonal. Peu financé (refusé par le CNC), le film a connu une belle carrière. Une des sensations ciné de 2023.

“La chair est triste hélas” de Ovidie

Le manifeste poignant d’une “impasse existentielle” : les femmes ont beaucoup lu ce livre, en 2023. Ovidie, Eloïse Delsart, ex-actrice de films X, devenue autrice féministe de documentaires et d’essais sur la sexualité raconte pourquoi elle a décidé de “sortir de l’hétérosexualité”, de faire “la grève du sexe”. “Je préfère retourner à ma solitude, ce cocon dans lequel je suis préservée de la violence.” Un texte devenu culte, à la suite d’un autre livre-charnière que fut le “King King Théorie” de Virginie Despentes.

Par Adrien Reyne

“Le Garçon et le Héron” de Miyazaki

Les années ou un nouveau Miyazaki sort au cinéma sont forcément des années importantes sur le plan cinéphile. “Le Garçon et le Héron” ne fait pas exception, avec plus d’un million de spectateurs en France (plus gros succès Ghibli à l’Hexagone). Cette libre adaptation du livre “Et vous, comment vivrez-vous ?” de Genzaburo Yoshino, datant de 1937, est le film-somme d’un cinéaste qui n’aura de cesse de rappeler l’horreur de la guerre et l’urgence écologique de notre monde. Ici, il fait aussi écho au devenir de son studio. Hayao Miyazaki convoque tous ses démons et ses influences pour nous offrir un spectacle d’une beauté inégalable. Certains l’ont trouvé plus difficile d’accès, la narration est déstructurée, mais c’est la volonté géniale de ce maître de casser les codes et s’en amuser pendant 2heures durant. C’est une œuvre qui marque déjà l’histoire de l’animation japonaise, de l’animation tout simplement.

“Mars Express” de Jérémie Perin

“Mars Express” a débarqué en novembre dernier : personne n’avait prévu qu’un film d’animation SF français fasse autant parler de lui. C’est le premier film d’un certain Jérémie Perin que certains connaissent déjà via la série France TV “Last Man”. Son humour noir pour adulte et son rapport à la violence faisait de cette série un moment de bravoure qu’on retrouve dans le puissant “Mars Express” qui montre à quel point le cinéma d’animation pour adulte n’est pas mort, français ou non, qu’on peut faire de la SF quoi qu’en dise les cyniques. Jérémie Perin est dorénavant un nom important qui risque bien de briller plus loin que l’hexagone et dialogue avec les plus grands : “Blade Runner” de Ridley Scott, “AI” et “Minority Report” de Spielberg et j’en passe. Culte.

“Dordogne” de Un Je Ne Sais Quoi

Dordogne est un jeu d’aventure narratif développé par le studio Un Je Ne Sais Quoi. Mimi, une femme de 32 ans, explore la maison de sa grand-mère récemment décédée, qui lui a laissé des lettres et des puzzles à résoudre. Les souvenirs de la petite fille qu’elle était l’aideront dans sa quête. Développé par des équipes indé en Dordogne, ce jeu est fait uniquement d’aquarelle. Un œuvre puissante, belle et intimiste qui amène l’émotion avec finesse. Un jeu indé certes, mais un grand jeu sur le plan de la narration et de la direction artistique. Tout le monde a versé sa petite larme à la sortie de cette histoire qu’on placera volontiers à côté des œuvres qui ont marqué 2023. Bouleversant.

Par Hélène Couturier

“Lizzy Mercier Descloux, Une éclipse”, Simon Clair

De LMD, les 50 ans et plus connaissent son “Mais où sont passées les gazelles”. Or, bien avant, l’artiste a marqué l’underground new yorkais des années 70, la no wave (ne pas confondre avec la new wave), celui de Patti Smith. Années 80, elle est une des premières à s’enhardir côté world music, de caresser la mixité musicale. Le journaliste Simon Clair nous entraîne dans le parcours iconique de cette muse hors concession disparue en 2004. De la très bonne biographie à la fois épurée et ultradocumentée. Édition Playlist Society. 14 euros.

“Bleu guitare” de Simon Baril

Un guitariste rock frenchie vit à Los Angeles son rêve d’adolescent lorsqu’une nuit après un concert, le rêve tourne au cauchemar. Réveil à l’hôpital : les mains mutilées. Fini la musique et place à l’écriture (thérapeutique ?) d’un journal ou plutôt d’un récit fictif couleur bleu nuit. Presque noir.  Une écriture poétique qui déroule sa douleur le long des grands boulevards de LA, comme dans un film de Robert Altman, “The long goddbye”. Editions La Tengo, 18 euros.

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