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L’Opéra Junior chante l’enfance sacrifiée des guerres

Sommes-nous à Londres, à Alep ou à Gaza ? Belongings met en scène des enfants et de jeunes adultes réfugiés de la Seconde guerre mondiale et, en perspective, de jeunes migrants de 2024. L’Opéra Junior impressionne dans cette oeuvre du compositeur écossais de 25 ans, Lewis Murphy, qui n’a rien de facile.

Pari audacieux de Jérôme Pillement

Les enfants déplacés, principales victimes des conflits d’hier et d’aujourd’hui sont au centre du livret de Laura Attridge offrant ainsi de nombreux rôles pour les différentes classes d’âge du chœur Junior montpelliérain.   

Un pari audacieux que relève Jérôme Pillement car l’écriture musicale de Lewis Murphy est complexe et son exécution semée d’embûches. Le directeur d’Opéra Junior, qui revendique son intérêt pour la musique contemporaine et la mise en lumière de jeunes compositeurs, s’est montré très enthousiaste sur cette œuvre pointant l’importance du rôle social de l’opéra face aux réalités politiques. 

En plusieurs langues

Benoît Benichou propose une mise en scène à la fois sobre et astucieuse, suggérant de façon subtile différents niveaux de compréhension par touches visuelles ou sonores. Pas d’évidences assénées mais des références, des propositions interprétatives : dans l’obscurité, des voix d’enfants appellent ou chantent dans de nombreuses langues. On y reconnaît des sonorités venues d’Afrique, du Moyen-Orient. La lumière fait apparaître un pupitre, celui d’un Forum pour la Paix où différents personnages viendront témoigner. 

Un très fin rideau permet de suivre en transparence différentes scènes en arrière-plan tout en servant d’écran de projection. Sans être adepte des images projetées et vidéos diverses quasi inévitables à l’opéra depuis quelques années, on peut reconnaître, qu’ici, les images servent le propos par petites touches bien conçues et offrent des ellipses temporelles originales. 

La répétition du malheur

Le public navigue entre Londres en 1940 et des camps de migrants et d’enfants déplacés apparaissant au gré des désastres écologiques et des divers conflits. Des chaises entassées semblent soudain des obstacles insurmontables pour ces enfants qui courent et tombent au milieu des ruines : sommes-nous à Londres, à Alep ou à Gaza ? L’effet de cette répétition du malheur à travers les décennies est saisissant.  

La complexité de l’œuvre de Lewis Murphy est d’autant plus surprenante qu’elle révèle une maturité inhabituelle chez un compositeur de 25 ans (cet opéra a été composé en 2017). C’est une partition très structurée et riche avec plusieurs niveaux d’écriture. Sans être illustrative, sa musique est tantôt dramatique et désespérée avec parfois des intermèdes joyeux et insouciants, émergeant comme la force vitale des jeunes migrants. 

Il y a différentes influences dans ma musique“, confirme le compositeur à LOKKO, “la musique baroque en fait partie. Le choral à la fin de “Belongings”, je l’ai écrit en pensant à un Requiem et cette musique, je l’ai pensée et ressentie comme de la musique baroque, comme un choral de Bach. Pas seulement dans les notes et la mélodie mais aussi dans les paroles : un petit agneau vient et porte la souffrance du monde. C’est le message de cette musique des enfants sacrifiés !“.

Lewis Murphy : “Je suis vraiment très heureux”

Le double chœur qui clôture Belongings, construit comme un choral, est bouleversant et magistralement interprété par l’ensemble des choristes. Chez les solistes grands juniors, on entend de très jolies voix féminines qui surmontent les difficultés de la partition avec plus de sûreté et de présence musicale que les garçons.

Une proposition montpelliéraine qui a réjoui Lewis Murphy comme il nous l’a confié à l’issue de la générale : “Je suis vraiment très heureux. Avec tout le staff, nous n’avions pas encore vu une version et un travail aussi aboutis. C’est une partition difficile pour des enfants et des jeunes gens. Je les avais rencontrés en janvier dernier et c’était un vrai challenge pour eux !“.

Photos Marc Ginot.

BelongingsDernière représentation, ce samedi 20 avril à l’Opéra-Comédie.

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