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“Le virus va balayer grand nombre de compagnies”

Laurent Cazanave est acteur, auteur, metteur en scène, directeur artistique de La Compagnie « La Passée » et « La Passée production ».  Il vit à Sèvres en région parisienne. Il raconte l’impact du confinement dans l’économie, les productions de sa compagnie et sa vie de travailleur dans le monde du théâtre.

La campagne créative « LA VIE AU TEMPS DU COVID-19 » est animée par Lionel Navarro.

 

 

Que se passe-t-il pour votre compagnie ?

Suite à l’annonce du gouvernement, nous nous sommes retrouvés comme tout le monde face à une situation inédite. Notre activité à l’arrêt. L’une de nos créations « Je me suis assise et j’ai gobé le temps » devait être jouée fin avril au Théâtre 14 et on devait commencer à répéter fin mars. Ce projet ambitieux, mêlant théâtre et cuisine, est porté à la fois par des acteurs professionnels et des élèves de lycée hôtelier (Guillaume Tirel à Paris, Yvon Bourges à Dinard). Nous avons tout de suite su que le report était inévitable, car la création dépend non seulement de la réouverture des théâtres mais aussi des lycées.

Un autre spectacle « l’Appel », spectacle de théâtre et de danse devait être repris au Théâtre de l’Opprimé également fin avril. Comme pour « Je me suis assise et j’ai gobé le temps », nous envisageons un report car la situation risque de durer. D’autres contrats de plusieurs acteurs et créateurs se sont vus annulés dont l’installation de Julie Flogeac à Niort en mai. Ceci est un vrai coup dur pour nous car, cette année, l’essentiel de nos programmations et de nos actions étaient prévues sur cette période de printemps…

Dans quelle situation économique se trouve votre compagnie de théâtre ?

Actuellement, nous nous retrouvons dans une situation délicate. Nous ne pouvons pas payer nos artistes car nos subventions étant des aides attribuées à la création du projet, nous voulons les garder pour pouvoir rémunérer les périodes de répétitions à venir lorsque nous créerons le spectacle en 2021

Nous travaillons, nous jeune compagnie, dans une économie très précaire où chaque sou malheureusement compte et où nous devons faire des choix. Cette situation financière met les acteurs et actrices ainsi que nos techniciens, techniciennes au chômage sans leur assurer les heures d’intermittence qu’ils devaient toucher.

Outre la situation de la compagnie, la situation personnelle est aussi difficile. Effectivement pendant cette période de confinement, les prêts bancaires et les loyers continuent de courir et ça que l’on soit payé ou pas. Nous sommes sans cesse en train d’imaginer comment on va pouvoir monter nos spectacles. Une jeune compagnie est son propre producteur, et ce n’est pas facile.

Quelles sont les réactions des lieux qui vous programment ?

Ce que nous attendons, c’est un soutien des structures qui nous accueillent. Et c’est le cas avec le Théâtre 14 et le Théâtre de l’Opprimé qui ont tout de suite cherché et trouvé une solution et des dates de report. Ce soutien est pour nous essentiel et nous les en remercions infiniment ! Grâce à eux, nous savons que même si cette année va être dure pour nous, nous pouvons envisager l’année 2021 avec la promesse d’une création ! Du 2 au 15 mars pour « Je me suis assise et j’ai gobé le temps » au théâtre 14 et au lycée Guillaume Tirel !

Qu’espérez-vous de la part de l’Etat ?

Comme jeune compagnie nous souhaiterions plus de reconnaissance de l’Etat et des aides. Effectivement, la situation sanitaire va balayer grand nombre de compagnies qui vont voir leurs spectacles annulés. Une annulation de spectacle pour une jeune compagnie, c’est une annulation de visibilité. Cette visibilité est essentielle pour nous jeunes créateurs ou créatrices. L’Etat et les collectivités territoriales doivent se rendre compte que certaines jeunes compagnies sont abandonnées et seules face à cette situation.

Depuis la mi-mars, qu’avez-vous mis en place pour préparer le retour à la « vie normale » ?

Face à cette situation, nous ne voulons pas nous laisser abattre. Nous travaillons donc d’arrache-pied au report des spectacles et nous avons ouvert sur notre site (1) un onglet « au cœur de la création » qui permet au public de découvrir les coulisses de nos créations : choix de scénographies, création des chorégraphies, confections de costumes ou de maquillage, choix dramaturgiques, lectures et autres répétitions par FaceTime. Nous ouvrons donc 6 spectacles à la vue de tous. De plus, pour les plus enfants, nous avons décidé de mettre en libres service les captations de 2 de nos spectacles jeune public « Rafara » et « Le roi des concombres ». ​

Nous avons fait le choix de la gratuité dans le cadre d’un geste solidarité envers les parents qui se retrouvent à devoir occuper les enfants pendant le confinement. Dans notre compagnie, notre but a toujours été d’apporter l’art à tous les publics, d’aller à leur rencontre. Nous voulons faire connaître notre travail et pour cela nous allons au-devant des spectatrices et des spectateurs. Chaque jour nous offrons aussi un poème de confinement. Lectures de textes, vidéos, danses créées par les artistes de la compagnie.

Nous profitons aussi de ce temps pour mettre à jour notre site et pour avancer sur la programmation et l’organisation de notre festival d’été « la Fourberie en scènes » (2) qui se déroulera du 12 au 15 août en plein air à Saint Lunaire (Ille et Vilaine), en espérant que tout sera terminé d’ici là…

Inventez-vous des coopérations avec d’autres structures et compagnies ?

Nous réfléchissons à des actions communes, solidaires comme notre participation au festival de confinement organisé par Les Echappés de la coulisse dans la veine de leurs festivals les « 48h du Sel » et « 48h Talloires ». Pendant 48 heures, les 4 et 5 avril derniers, nous avons partagé des vidéos, des textes, en direct à partir de chez nous. Une cagnotte a été proposée, cagnotte qui sera reversée à un hôpital. Nous allons aussi faire « un cadavre exquis » avec des auteurs et des autrices. Un auteur, une autrice écrit un texte. Ses deux dernières lignes sont envoyées à une autre personne qui continue le texte et ainsi de suite. Nous participons aussi aux lectures organisées tous les jours à 18h en direct par le Théatre 14.

L’idée étant de rapprocher des compagnies dans ces temps difficiles et de continuer à faire partager notre travail et notre passion, mais aussi quand nous le pouvons aider les soignants.

Photo-Portrait : Avril Dunoyer

(1) https://www.compagnielapassee.com

(2) https://www.festivallafourberieenscenes.com.

 

 

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2 Commentaires
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Raynard
Raynard
3 années il y a

Situation difficile pour tous les théâtres et les compagnies…. Merci de relayer leurs difficultés..

Valérie Hernandez, directrice de publication LOKKO -journaliste-
Administrateur
Répondre à  Raynard

Oui, nous allons faire plusieurs “Entretiens Zoom” sur le sujet.

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